1940, la bataille de france

Publié le 16 Février 2024

Extrait du Journal Officiel du 30 juillet 1942 page 2625

La bataille au sud d'Amiens durera du 20 mai au 8 juin 1940. L'offensive allemande du 5 juin va ébranler la ligne de front avec l'emploi de chars en grand nombre.
Pilonné par l'artillerie, Saint Fuscien disparait dans la fumée mais les défenseurs vont tenir l'ennemi en échec. Cependant, se produit un nouvel assaut. A 5h45, les hommes des lieutenants de SANVAL, PUISSANT et Bernard  CHAMPY détruisent 3 chars, les munitions s'épuisent, les réserves sont presque vides.
Des incendies ravagent la partie Nord de Saint Fuscien, l'organisation défensive est réduite à néant. Les lieutenants de SANVAL et CHAMPY sont tués au cours de combats héroïques. Le lieutenant PUISSANT, grièvement blessé est fait prisonnier, c'est la confusion.
Vers 10h, les Allemands occupent la partie nord de St Fuscien. La ligne de démarcation passe par le château. Jusqu'au 8 juin 1940, de nombreux combattants sans distinction ont disparu dans les assauts d'un front d'une centaine de kilomètres. Des sacrifices comme ceux du lieutenant CHAMPY, tué l'arme à la main au champ d'honneur, ont été nombreux.

Source : Docteur Pierre Vasselle. "La bataille au Sud d'Amiens" du 20 mai au 8 juin, 1940.

Jacques Lejosne

*

Bernard CHAMPY, mort pour la France le 5 juin 1940 à Saint-Fuscien, avait 23 ans. Il était né
le 12 janvier 1917 à Asnières (Eure). Sous-lieutenant au 89e régiment d'infanterie (89e RI)
il fut nommé au grade de chevalier de la Légion d'Honneur à titre posthume.

Pour prolonger avec un autre extrait de l'ouvrage de Pierre Vasselle.

 

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Publié le 15 Février 2024

Les parents de Robert vivaient dans la côte de la route d'Airaines à Abbeville ; c'étaient de petits agriculteurs (2 vaches, 2 chevaux). A Noël 1939, Robert a eu un vélo et quel vélo ! Une famille, dont les enfants étaient grands, a pensé à Robert. Ce vélo était rudimentaire : sans frein, à pignons fixes donc qui fonctionnait sans arrêt ; pour freiner, il fallait pédaler moins vite ou mettre un pied sur la roue ! Pour Robert, qui avait 9 ans, c'était inespéré.

Pendant cette « drôle de guerre », les Airainois voyaient, depuis quelques temps, les réfugiés du Nord et de la Belgique traverser leur petite ville. Les Anglais étant en stationnement sur le terrain de foot, les habitants étaient conscients du danger. Le lundi matin 20 mai 1940, ils entendirent les avions. Le père de Robert, qui avait fait la guerre 1914-1918, emmena sa famille dans un petit chemin creux qui donnait dans le haut de la route d'Abbeville. Après le bombardement, le père décida de partir à Andainville où le frère de Robert avait un copain. La famille entassa ce qu'elle pouvait, y compris le vélo de Robert qui était précieux pour le petit garçon, dans 2 tombereaux tirés par les chevaux. Première étape à Andainville où on fut obligé de laisser le vélo de Robert. Le père décida de traverser la Seine aux Andelys. Un 3éme tombereau se joignit à eux. Il fallut 3 jours pour y arriver. Ensuite direction Vitré puisque l'ordre d'évacuation était l'Ile et Vilaine pour les habitants de la Somme.

Il y avait de l'entraide car des femmes, avec jeunes enfants et personnes âgées, conduisaient des tombereaux.
Les grands parents de Robert, eux, étaient restés pour garder la maison ! Le 31 mai, l'Administration française décidant l'évacuation totale, les grands parents partirent avec les Avelange, eux aussi agriculteurs. Pas de nouvelles ! Ils revinrent avant les parents de Robert. Le retour se fera vers le 10 juillet en passant à Saint André de l'Eure où le père connaissait un ami ; là ils aidèrent à biner les betteraves. Ils eurent l'idée de repasser à Andainville où Robert retrouva, avec bonheur son vélo.
Père et fils revinrent en éclaireurs à vélo. Ils passèrent à Métigny puis empruntèrent la rue de l'Abbé Perdu. Là, ils vécurent un moment pénible ; Airaines était un champ de ruines : les maisons en torchis avaient brûlé, seules restaient les cheminées de briques noircies. Un passage d'environ 3 mètres était bordé de décombres. L'église, en partie bombardée, avait servi d'infirmerie pour quelque 250 blessés français, africains et allemands. Le vide et le silence étaient impressionnants. Leur petite ferme et leur maison en viager étaient détruites. Seule leur restait une petite maison endommagée par un obus près du terrain de foot ; le père l'avait achetée pour le terrain meilleur que celui dans la côte crayeuse de la route d'Abbeville, découragé, il fit demi-tour en voyant le désastre. Après discussion avec sa femme, ils décidèrent de s'installer chez la grande mère maternelle puis dans la petite maison touchée par l'obus.

Je remercie Monsieur Robert Poiret qui a bien voulu me raconter ce souvenir d'enfance. Monsieur Poiret a tenu à souligner le courage des femmes pendant cette triste période de notre Histoire.

Maryse Confrère

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Publié le 15 Février 2024

Mai 1940, à l'approche de l'ennemi, la ville de Moreuil avait été évacuée par les civils ; le 5 juin, des incendies sont allumés un peu partout, des ruines s'accumulent sous les bombardements. La rue Thiers, la place de la Seine-Inférieure, la rue Pasteur, l'entrée de la rue Victor Gaillard, l’hôtel de Ville et l'église ont été atteints.
Une dramatique situation mettant en fuite de nombreux Moreuillois. "Le Progrès de la Somme" dont le siège provisoire se trouvait à Lorient indique en sous-titre : "Le journal des réfugiés originaires de Picardie" fait de la place pour évoquer le sort des exilés, là où ils se trouvaient. L'espoir de se revoir ranime les courages abattus. Dans le sauve qui peut général, ou presque, on retrouve par le biais de la presse en question : Marcel FERBUS, Maire de Moreuil à Quetreville (Manche), le doyen et le vicaire de la commune à Igé (Orne), la pouponnerie du docteur RUIN à Ambrures (Mayenne), la Société Nouvelle des Anciens Etablissements BOULY au 89 rue Réaumur à Paris, des réfugiés sont à Saint-Colasse-en Sarthe (Orne)...

Un contexte particulier où certains Moreuillois n'étaient pas au courant qu'une bataille se déroulait au sud d'Amiens avant l'entrée des troupes allemandes dans Moreuil et ses environs. Amiens a perdu ses derniers combats.
Le 17 juin 1940, le Maréchal Pétain demandait l'Armistice. Peu à peu la population rentrait chez elle. En sens inverse, elle reprenait le chemin du retour, porteur des fardeaux et hardes emportés précipitamment.
Le 4 août 1940, 53,57% des habitants de la Somme étaient revenus pour atteindre 65,58% le 20 août selon les statistiques.

Peu avant ces retours, le "Progrès de la Somme" écrivait : "La vie commande ; soyons aujourd'hui digne d'hier. Haussons nos énergies au niveau de l'adversité, car c'est dans le malheur qu'un peuple peut offrir au monde qui le regarde les prestigieux spectacles de son éternelle grandeur. " De belles paroles pour les familles qui hélas s'apprêtaient à vivre des moments douloureux sous l'occupation allemande.

Jacques Lejosne,  Les Lagache, une famille Moreuilloise dans la tourmente, 2012

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Publié le 15 Février 2024

Le 7 juin 1940, 33 soldats français appartenant au 41ème Régiment d’Infanterie, 19ème Division, tombèrent sous les balles des S.S.

Après avoir évité un groupe d’auto mitrailleuses ennemis en s’échappant à travers champs, le groupe, composé d’une quarantaine d’hommes commandé par le sous-lieutenant Primel se dirigea vers Beaufort en traversant la plaine avec leurs armes individuelles et un fusil mitrailleur. Après avoir contourné Warvillers, ils se trouvent face à une mitrailleuse. Croyant avoir à faire à des Français, ils crient qu’ils l’étaient aussi. Essayant sans succès de repérer l’arme, le sous-lieutenant Primel décide alors qu’il devait se rendre.

Les Allemands les conduisirent dans un petit chemin à environ 500 mètres de Beaufort. Le sous-lieutenant Primel, parlant allemand, parlementa avec eux puis ses hommes le virent partir à bord d’un side-car ; ils se retrouvaient seuls. Quelques minutes après, les soldats S.S. de la Wehrmacht arrivèrent et commencèrent leur sale besogne. Il y eut 4 survivants, l’un blessé, mourut à Beaufort ; un second, grièvement blessé, mourut à l’hôpital de Marcoing près de Cambrai, le troisième Francis VASLET et le quatrième le caporal DELATOUCHE, auteur du témoignage qui suit.

Extraits du témoignage du caporal Delatouche, l’un des survivants :

 On nous fait avancer sur du terrain labouré entre du trèfle et du blé, environ 50 mètres devant ces mitrailleuses ; mais là je vous dirai qu’on a compris. On voyait que l’on allait mourir. Notre cœur ne fait plus qu’un tic-tac. On nous tasse dans un rond, debout, serrés les uns contre les autres. On nous frappe… mais non, c’est fini ; voilà les deux armes en action. C’est un vrai massacre... Le tir est fini, et miraculeusement je me tire sans aucune blessure. Seulement, je ne bouge pas, je fais le mort. Maintenant, sans pitié pour nous, c’est au révolver que l’on nous domine. C’est fini ; je désespère ; j’attends une balle. Deuxième chance, la balle me passe entre les oreilles, je m’en tire encore. On n’entend plus rien ; je crois qu’ils sont déjà tous morts. Pichouron expire couché sur moi.

Maintenant que va-t-il se passer ? J’attends de nouveau. Voilà encore les deux mitrailleuses en action. De ce coup je me dis : c’est fini. Non !! Tir terminé… mais je continue toujours de faire le mort ; je suis couvert du sang de mes camarades. Quelques heures se passent. Je suis toujours immobile. Tout à coup une voix se fait entendre : « Y en a-t-il qui n’ont rien ? » Moi, je réponds : on se barre… Tous les deux nous avons fait 2 kilomètres en rampant. Tout à coup nous apercevons deux ennemis venant dans notre direction ; moi, je me planque dans des ronces ; mon copain un peu plus loin ; pas de chance, mon copain est ramassé ; il est prisonnier… Il a été emmené à Cambrai puis en Allemagne.

Le lendemain samedi 8 juin quand je ne voyais rien j’allais manger des fraises ; pendant 9 jours j’ai mené cette vie, quand j’ai vu des premiers réfugiés rentrer. Veine, ils étaient de Rosières. J’ai été avec eux pendant un mois, j’ai vécu avec ces braves gens, avant de prendre le chemin du retour.

***

Souvenirs et témoignages sur les opérations et les combats de la 19° division pendant la guerre 1939 – 1940 ; 41° Régiment d’infanterie ;

Remerciements à André Van Den Bossche pour le prêt des documents

RP Louis Bourdais

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Publié le 15 Février 2024

Photo ECPAD https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/conde-folie

En juin 1940, les nazis décident de traverser la Somme pour se diriger vers Paris. Le plan de Rommel est d'utiliser les ponts et voies ferrées secondaires pour franchir le canal et la route D 218 pour rejoindre la ligne Paris-Calais, accessible grâce aux raids répétés dans la nuit du 4 au 5 juin. Le génie allemand a déboulonné les rails et dégarni les ponts permettant aux chars de circuler sur le remblai puis par un plan incliné gagner la route 218 puis Hangest.
La défense de Condé Folie est confiée à la 2ème Cie du 1er Bataillon du 53ème RICMS commandée par le Capitaine Magnien (le 53ème avait été formé en 1939 d'hommes originaires du Languedoc, du Roussillon, du Massif Central et complété en 1940 par un détachement sénégalais).

Le 5 juin, le village est attaqué massivement ; l'armée française résiste de maison en maison. Les nazis finissent par utiliser des lance-flammes pour l'anéantir : 200 soldats tués. De même à Airaines ; c'est encore le 53ème RICMS commandé par le capitaine N'Tchoréré (originaire du Gabon) qui a résisté ; racistes, les nazis ont abattu le capitaine d'une balle dans la tête. Dans le village voisin, à Longpré-les-Corps-Saints, les Africains, retranchés dans les caves ont été exterminés aux lance-flammes. Ce massacre, ainsi qu'un terrain communal près de l'église expliquent le choix de Condé Folie pour ensevelir toutes les victimes de la barbarie nazie en 1940 dans la région.

Jusqu'en 1955, les corps ont été inhumés dans de nombreuses communes du département. A la fin de l'année, la majorité des corps fut rassemblée au Cimetière National de Condé Folie, vaste nécropole de près de 3000 soldats dont 1000 Inconnus.

Maryse Confrère
Sources : Courrier Picard : 23 et 24 juillet 1955, 29 septembre 1955

Antoine Redier, Gestes français, Editions Xavier Mappus, 1944

Remerciements à Monsieur Flesselle, habitant de Condé Folie et passionné de la Seconde Guerre mondiale
« Gestes français » de 1944

Pour prolonger  : le site Chemins de mémoire

 

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Publié le 15 Février 2024

Gabriel LAOUT, mon père, soldat dans le 2ème bataillon du 161ème R.I.F., est parti le 24 août 1939 rejoindre la caserne de Boulay en Moselle. Durant 10 mois ce bataillon a consolidé la Ligne Maginot dans sa partie sud, près de Ricrange, élevant les murs en béton, creusant tranchées et abris. Les soldats devinrent maçons et terrassiers, pour construire cette barrière réputée infranchissable, orgueil de la France. Elle y a consacré une grosse partie de son budget militaire.
« Ils ne passeront pas », telle était la devise du Bataillon !
Le 10 mai 1940, Hitler a décidé d’envahir la France là où ne l’attendait pas la défense nationale. Il a contourné la ligne par les Ardennes et par le sud. Le Gouvernement de notre pays s’est montré bien minable à l’heure de l’affrontement.

Le 13 juin, pour éviter l’encerclement, le bataillon sous les ordres du commandant EYMERIT, est sorti de cette ligne Maginot devenue inutile pour affronter l’ennemi qui arrivait au sud de Nancy. Les hommes ont parcouru près de 100 km, la rage au coeur, à la hâte, et se sont retrouvés au lieu-dit « La Madeleine », à Laneuveville devant Nancy.
A cet endroit, un magnifique Pont-canal de la Marne au Rhin enjambe la Meurthe. La mission du 161ème R.I.F. était d’empêcher les Allemands de franchir ce pont. Ils l’ont accomplie avec panache du 18 au 20 juin, c'est-à-dire après la chute de Paris et la reddition voulue par Pétain le 17 juin.
Sur les 550 soldats, 54 furent tués. On évalue à 4000 le nombre d’obus tirés par l’ennemi.
11 bateaux qui ont tenté la traversée ont été coulés et les pertes ennemies dues à la configuration du terrain et à la défense valeureuse ont été terribles, on parle de 700 hommes mis hors de combat. Le 20 juin à 4 heures du matin, les Français, sans munitions, ont baissé les armes.

Les Allemands en colère devant cette défense héroïque ont empêché les Français d’enterrer les morts dans le cimetière communal et jetèrent leurs objets personnels dans les latrines de l’usine située à cet endroit. La courageuse institutrice de La Madeleine, madame LOUIS, alla se plaindre auprès des officiers allemands qui ont obligé les malfaiteurs à les repêcher ! Elle fabriqua alors des sacs qu’elle a envoyés dans les familles et les habitants ont construit un enclos qu’ils ont toujours fleuri. Ils les appelèrent les premiers résistants de France.
Sitôt la reddition, les soldats du 161ème R.I.F. ont pris le chemin des stalags.
Après 5 années derrière les barbelés, mon père est mort en janvier 1945, épuisé, peu de temps avant l’arrivée des Américains.

Ce récit nous a été raconté par deux passionnés d’histoire, Jacques MANGENOT et François CLAUVELIN Je possède la copie d’un témoignage de mon père qui se trouve à la Croix Rouge internationale de Genève. C’est ainsi que j’ai pu emmener deux de mes petits-enfants à l’endroit où il s’est battu. Monique et moi avons retrouvé son dossier médical dans une caserne à CAEN.
J’ai 84 ans. Depuis 80 ans, ceux qui évoquent la débâcle de 1940, oublient un peu trop facilement les milliers d’anonymes qui ont défendu l’honneur de la France.

Jean-Marie LAOUT adhérent

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